Le Négateur – Acte 1 – Mélodie

Le Négateur – Acte 1 – Mélodie

Préface

Dauphins Déchaînés souhaite réhabiliter le concept du Roman-Feuilleton, qui à connu ses heures de gloires à l’époque de grands comme Jules Vernes. Nous donnons ainsi la plume à de jeunes (ou pas) auteurs qui souhaiteraient utiliser ce nouveau format pour faire connaitre leurs romans.

Les romans-feuilletons apparaitront à un rythme mensuel (ou bimensuel, la décision n’est pas encore tranchée), à raison d’un ou deux chapitres du roman total à la fois.

Comme nous sommes ici dans un format numérique, il s’adapte aussi au format vidéo et/ou audio. Ainsi, si l’auteur le souhaite, un des animateurs de Dauphins Déchainés pourra lire le texte et le soumettre au format Audio, téléchargeable sur la page du chapitre.

A la fin du Roman Feuilleton digital, une version papier « à l’ancienne » sera éditée par Dauphins Déchaînés.

Le premier à paraître est un peu spécial dans le sens où l’auteur à tenu à rester anonyme. Je cite la seule partie qu’il nous a autorisé à publier quant à ses motivations pour ne pas être cité comme auteur: « Ce roman a été écrit pour être lu ». Il nous a autorisé a écrire qu’il est Mauricien.

L’auteur n’a pas souhaité nous procurer le résumé de l’oeuvre. Il souhaite que la découverte soit complète pour le lecteur tant sur le fond que sur la forme.

Ainsi s’ouvre le premier chapitre du premier roman-feuilleton édité par Dauphins Déchaînés: Le Négateur.

Le Négateur

Acte 1 – Mélodie

« D’immondes cheveux blonds tombaient savamment sur un affreux visage parfait.« 

La nuit était tombée, avec elle son cortège de mystères, de superstitions et de réalités. Une pluie d’été inondait les ornières du chemin et des psychés, symbole d’altération pour l’un et d’angoisse pour les autres.

Les éléments du décor étaient en place, immuables, le silence aliénant de la normalité assourdissait le lieu. Le temps coulait à son allure habituelle. Il glissait sur les objets et les esprits, les imprégnant de sa marque, imperceptible mais bien réelle. 

Naissant de causes improbables, des notes vinrent caresser l’espace et le temps. Elles s’assemblèrent lentement pour forger une mélodie d’où s’échappait des senteurs d’espoir. Un renouveau simple et nu, mué par une force enfin réveillée, s’accrochait à ces notes qui le présentaient au vieux monde.

L’Espoir flottait sur la ville, porté par la douce mélodie. Elle flottait sûrement, arrêtant le dangereux et tumultueux temps sur son passage. La mélodieuse embarcation voguait assurément sur la mer d’éléments du vieux monde, sécurisant la traversé de son occupant. 

Penché sur l’espace, le Sentiment observait. De rares âmes défilaient, sans intérêt dans l’océan de vie. L’ennemi était partout mais ne veillait pas. Le temps du combat était révolu depuis des ages immémoriaux rendant inutile la traque de l’Unicité.

Le Sentiment vit l’Homme, enfin. Le but de son voyage était en contrebas, debout dans la pluie, le visage levé vers le ciel noir, scrutant, attendant. Les gouttes d’eau venaient mourir sur Son visage. Il ferma les yeux. Le Sentiment quitta l’embarcation et fondit sur l’Homme. 

La mélodie porteuse mourut aussitôt, se dissipant dans l’espace et le temps, laissant place à la larme. Elle vécu un court instant au coin de l’œil de l’Homme avant d’être lavée de sa joue par la pluie qui redoublait de force à se moment. Il ressentit d’abord, il entendit ensuite. Il n’osait ouvrir les yeux, il avait peur. La compréhension s’était emparée de lui. Il ne pouvait désormais plus occulter la Vérité. Elle s’imposait à ses sens et à son esprit, effrayante de puissance et d’horreur. Un léger tremblement anima son visage. Il ne dura qu’une seconde puis cessa. L’Homme avait accepté.

Son temps était arrivé, mais pourquoi si tôt ? La décision ne lui appartenait pas mais il acceptait ce nouvel état de fait comme un présent. La compréhension n’était pas encore totale, mais suffisante pour entrevoir le Plan global.

Il ouvrit les yeux et l’horrible vérité s’imposa en cruelle évidence. L’Homme s’effondra sur la route pavée, et à genou il enfoui son visage entre ses mains. 

Je n’y arriverai pas ! Il est partout ! Il est puissant ! Aidez moi ! Eloignez de moi ce fardeau !

Le tonnerre gronda au loin. Le ciel semblait s’assombrir si cela était toutefois encore possible. Les trombes d’eau fondaient sur le sol comme si elles voulaient déjà aider à creuser les tombes. Elles frappaient les obstacles qu’elles rencontraient comme autant de flagelles semblant vouloir punir les éléments dont le seul tort était d’exister. Et l’homme cria. 

Les derniers démons de l’ancien monde qui occupaient encore son âme fuyaient à travers ce cri interminable. La confession était donnée en même temps que le pardon. Le cri mourût avec le mal qu’il portait. L’Homme s’écroula de tout son long, hors d’haleine. Un volet claqua derrière lui, fermé à la hâte. 

Son visage baignait dans l’eau de ruissellement. Il tentait de reprendre son souffle. L’Homme se sentait purifié, ses poumons, ses artères, son sang, son esprit et son âme respiraient librement la liberté retrouvée.

La masse noire se redressa au bout d’un moment. Il baignait dans une légère vapeur produite par la chaleur de son corps. L’Homme vit la valse des entités grises. Il n’aurait su dire depuis combien de temps elles étaient là. Elles planaient au dessus de lui, formant des cercles concentriques.

Il entendait leurs sombres murmures. Elles psalmodiaient d’inquiétantes incantations. L’Homme vit qu’elles lui montraient la voie. Il les suivit. La route pavée défilait, accompagnée par les deux rangées de bâtiments qui surveillaient l’Homme. Il marchait sereinement. Le Plan se révélait à lui peu à peu. Il comprenait. Il savait vers quoi le menaient ses pas. Les vapeurs grises le menaient droit vers le premier acte.

Il le vit. L’homme Social. Adossé à un mur, tentant de se protéger de la pluie, attendant. L’Homme leva le visage vers le cieux, cherchant un dernier signe contradictoire qui pourrait lui montrer son erreur, lui montrer que tout ceci n’était que pure folie. Rien ne vint. Les ombres grises flottaient en revanche au dessus de l’homme Social, toujours en cercle concentrique. Le mur n’existait pas pour ces choses et n’altérait pas leurs formations. Elles y entraient et en sortaient comme s’il était d’une autre dimension et n’interférait pas avec ce monde.

L’Homme avança. La cible l’entendit approcher et releva la tête. En guise d’homme Social, l’Homme vit une femme Sociale. D’immondes cheveux blonds tombaient savamment sur un affreux visage parfait. La pouffiasse tenait à la main l’outil dont elle se servait pour élaborer le désastreux masque Social. Un rouge sang dessinait une bouche. Un bleu mortuaire esquissait des yeux, un rose livide caricaturait un visage. Des couleurs grotesques modelaient un corps. Tel était la femme Sociale, image hypocrite d’une putain dessinée pour provoquer un désir non avoué. 

Elle le regardait d’un regard injustement assuré. L’Homme pencha tristement la tête sur son épaule et contempla la femme Sociale tristement. Ses yeux plongeaient dans les siens à la recherche d’une quelconque unicité. Il n’en trouva pas et dût se ranger à l’avis des vapeurs grises. Le premier acte devait être accompli. L’Homme en était conscient. Mais il était également conscient que l’accomplissement de celui-ci l’entraînerait inéluctablement sur le chemin des suivants. L’Homme l’accepta.

Ses yeux étaient toujours plongés dans ceux de la femme Sociale lorsque l’ultime doute fût balayé de son esprit. Elle vit le changement. Un orage de colère grondait au fond des yeux de ce dément, la pétrifiant. 

Elle resta de marbre lorsque la main rédemptrice fusa vers son visage. Lorsqu’elle le percuta de plein fouet, son crâne fut projeté contre la paroi. La violence du coup fut tel que le son des os brisés couvrit un moment le celui des trombes d’eau. Le dernier message qui parvint au cerveau traumatisé de la femme Sociale fut une odeur de poulet rôti, produit d’une quelconque réaction chimique due au choc.

Le corps inerte s’écrasa lourdement sur le sol. L’Homme observa avec intérêt le sang qui s’échappait de l’arrière du crâne de la bête. Il était d’abord d’un rouge sombre mais se mariait rapidement à l’eau de pluie avec qui il ne faisait rapidement plus qu’un.

L’Homme se pencha sur le corps. Il vivait encore. Il prit la tête du tas de viande à deux mains et d’un violent et rapide mouvement il la fit pivoter sur elle-même selon un angle improbable qui emmena le menton entre les deux omoplates. Un bruit sec suivi de plusieurs cliquetis accompagna le geste. Le cerveau était désormais coupé du reste du corps, tout était consommé. 

Victor au manteau noir relâcha la tête et se releva. Le sentiment du devoir accompli l’emplit d’une félicité telle qu’il ne pût retenir un petit rire. Un profond bonheur se lisait sur son visage. Il se savait désormais prêt à poursuivre l’Oeuvre. Elle primait sur tout le reste.

Victor jeta un dernier regard au corps inerte à ses pieds, premier symbole d’une défaite sociale annoncée. Il rit une dernière fois. Se retournant, il se dirigea vers une petite ruelle sombre avant d’y disparaître.

La pluie continuait à malmener furieusement les matériaux. Mais pourtant, si l’on tendait attentivement l’oreille, on eût entendu la colère de la ville, la colère de Social.

Fin du l’acte 1



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